Partager la publication "Si la cour du mouton est sale, ce n’est pas au porc de le dire de Florent Couap-Zotti"
Voici un livre tout bonnement jubilatoire par sa langue. J’ai eu souvent l’occasion de me faire cette réflexion : les écrivains francophones manient la plume avec une habileté que je peine à trouver chez les auteurs français contemporains.
De quoi ça parle :
A Cotonou, Saïd fait partie des Libanais qui se sont installés après avoir fui leur pays et qui se sont enrichis dans le commerce du textile. Mais quand la chance l’a quitté, Saïd y a perdu jusqu’à l’un de ses bras. Mais la fureur, elle, ne l’a pas lâché. Et désormais c’est du trafic de drogue qu’il vit, ne laissant personne se mettre sur son chemin. Et certainement pas cette pute de Saadath qui a eu l’audace de lui subtiliser une valise pleine de drogue.
C’est donc le meurtre de cette jeune femme qui ouvre le roman et va déclencher une suite d’événements qui vont emmener les personnages toujours plus loin vers l’enfer.
Samuel Dossou Kakpo, un ancien policier devenu détective, va se retrouver coincé dans un engrenage infernal puisqu’il va finalement se rendre compte que ses deux nouveaux « clients » sont en fait reliés par la même histoire. Meurtres de sang froid et poursuites infernales finissent de pimenter ce roman.
Ce que j’en ai pensé :
L’intrigue est sympa et se met bien en place. On sait d’emblée qui est l’assassin, on sait le mobile. Ce qui est intéressant c’est la manière dont les personnes sont liées entre elles et comment tout se noue autour de ce petit groupe de personnes. Je note tout de même un petit ralentissement dans certains chapitres qui ménagent la fin, mais cela n’a pas été suffisant pour atténuer mon plaisir de lecture. J’ai beaucoup aimé les personnages masculins, moins les personnages féminins que j’ai trouvés un peu caricaturaux.
Ceci dit, je dois vous expliquer ce que j’ai aimé par dessus tout : la langue. J’aime chez les auteurs africains (et antillais) que j’ai eu l’occasion de lire cette manière à la fois littéraire et décalée d’utiliser la langue française. Les mots sont maniés à la perfection tout y ajoutant une pointe savoureuse dans les comparaisons et les expressions qui se nourrissent de la culture d’origine.
Par exemple, vous croiserez au coin d’une page, des mots africains (traduits dans un lexique), ce genre d’expressions : « Rira bien qui se déchirera la gencive le dernier. », « »Smaïn courait comme un diarrhéique. » Mais aussi les titres imagés des chapitres, à l’image du titre du roman : « Le grain de maïs a beau courir, il finit toujours sa course dans le bec du coq. », « C’est en voulant s’assoir qu’on connaît l’utilité des popotins », « Qui veut avaler un coco fait confiance à son anus », etc.
Je remercie Anne des Editions du Serpent à Plumes pour cette très belle découverte. Ce roman est paru le 14 janvier, alors n’hésitez-pas.
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