Héritiers maudits d’un effrayant geste collectif attisé par une féroce répression sexuelle qui, trente ans plus tôt, a profané le corps d’une femme et marqué leurs destins respectifs du sceau de la désespérance, quatre hommes liés par la fatalité du sacrilège traversent la Méditerranée pour connaître, sous le ciel algérien, l’ultime épisode de leur inconsolable désastre. Sur un motif de tragédie antique, de crimes réitérés et d’impossible expiation, Kaoutar Harchi retrace, de la nuit d’une prison française à la quête des origines sous les cieux de l’Algérie, la fable funeste d’une humanité condamnée à s’entredéchirer dès lors que ceux qui la composent, interdits de parole ou ligotés par le refoulement de leur mémoire, sont rendus incapables d’exorciser les démons qui gouvernent leur chair animale.
Mon avis
Ce roman polyphonique est frappant de maturité malgré la toute jeune plume de Kaoutar Harchi qui n’en est cependant pas à son premier roman.
Tout démarre à Paris, sur fond de mensonges et de crime. Arezki grandit auprès d’un homme, Si Larbi, dont il ne sait au final pas grand-chose, ignorant tout de ses origines. De plus, il est hanté par des désirs féminins qu’on lui a toujours présentés comme malsains et inaccessibles. Résultat, un soir, il dérape. En prison, le destin va mettre sur sa route deux hommes. Un qu’il ne sait pas déjà faire partie de son histoire, Riddah, et un autre qui va l’accompagner dans sa quête, Ryeb.
Ce récit mêle à la fois le récit initiatique et cette impression d’évoluer au sein d’une pièce tragique. On le sent dès les premières pages, cette histoire ne pourra pas bien se terminer. Kaoutar Harchi emprunte avec beaucoup de talent aux drames antiques qu’elle revisite avec beaucoup de sensibilité. Une construction qui fait alterner les quatre voix des protagonistes de manière à alourdir, page après page, le fardeau qui pèse sur les épaules de chacun et que le lecteur va découvrir bribe par bribe, horreur après horreur.
Aucune voix féminine à proprement parler dans ce roman même si sa présence n’en est pas occultée pour autant. Mais sa voix ne sera pas exprimée, métaphore de la place de la femme dans certaines sociétés, femme qui est sommée de laisser sur l’autel de la religion non seulement son apparence mais sa dignité.
Un court roman puissant, bouleversant qui fait partie des textes qu’il faut lire en cette rentrée littéraire. Un texte qui dit tout haut ce que beaucoup cherchent à voiler.
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