Baiser après #METOO – Lettres à nos amants foireux

baiser    Baiser après #metoo est un bouquin malin et percutant. Les textes d’Ovidie et les dessins de Diglee font mouche une nouvelle fois.

   Le titre Baiser après #metoo, provocateur comme on aime, annonce déjà la couleur, mais le sous-titre… on en parle de ce magnifique sous-titre ? Lettres à nos amants foireux ! Ouais, de temps en temps ça fait du bien de le dire…

    Je m’étais déjà régalée de leur précédente collaboration, Libres. D’ailleurs, de manière plus générale, je suis fan du travail d’Ovidie. J’aime sa vision très ouverte de la femme et de la sexualité. J’aime sa manière de réinterroger les codes établis.

    Dans cet opus, Ovidie écrit des lettres fictives à des amants de papier. Elle compile sa propre expérience, ainsi que des témoignages et en extrait une matière textuelle des plus fines. Le but ce n’est pas de tirer gratuitement à boulet rouge sur les hommes. Au contraire. Mais de savoir comment on peut encore baiser aujourd’hui. Je l’ai lu, certes, comme une pique bien frontale, mais pas seulement. En effet, ce qui est avant tout demandé c’est de sortir des schémas traditionnels qui placent l’homme, de manière plus ou moins consciente, dans une position dominante dans la relation de couple. Et ce, essentiellement car la sexualité est envisagée avant tout par le prisme de leur désir et de leur pénis…

    Ovidie ne rejette rien en bloc, elle amène à changer les angles de vue, à ouvrir des perspectives. Elle ne prône pas l’abandon de la pénétration ou de l’hétérosexualité, par exemple. Elle invite à ne pas en faire l’étalon de référence. Ce n’est pas l’hétérosexualité qui définit le fonctionnement de l’attirance, ni du couple. Et une relation sexuelle sans pénétration, même avec une personne dotée d’un pénis, est une relation sexuelle à part entière et satisfaisante. Cessons de voir les choses de manière unilatérale et de ne pas respecter les envies et les particularités de nos partenaires.

Les dessins de Diglee sont savoureux, comme toujours, et illustrent à merveille le propos. Chapeau l’artiste !

Baiser après #metoo : Caricature ou réalité ?

Quand j’écris un article, j’aime regarder ce que d’autres que moi ont pensé du livre. Confronter mon point de vue avec d’autres, surtout quand ils sont différents. Un avis en particulier m’a marquée… Une femme qui se disait agacée d’un tel pessimisme, qu’elle n’avait pas rencontré de tels hommes, quand même. Et donc que ce livre était exagéré. J’ai eu envie de me prêter à l’expérience et de faire le bilan de mes propres expériences, à la lueur des différentes lettres… Moment confession…

LETTRE A CELUI QUI…

  • pense que « maintenant on ne peut plus draguer » : alors là… je pourrais faire une liste longue comme le bras de mecs, à qui on a rien demandé, et qui font des allusions navrantes et persistantes sur tout un tas de choses de ton apparence. Qui te disent à de nombreuses reprises à quel point tu es charmante, qui commentent ta tenue vestimentaire avec si possible la petite blague salace qui va bien sur un bouton qui pourrait sauter, un décolleté plongeant, etc Oh ça va, on peut rire, hein ! Ouais ben le comique de répétition a ses limites…
  • se plaint de se faire constamment « friendzoner », ou le prétexte de « normal, les filles, vous n’aimez que les salauds ». Ouais ben, désolée, les mecs, on ne peut pas plaire à tout le monde. Et ouvrez les yeux, c’est pas parce que vous êtes un gentil que vous êtes seul, mais peut-être bien pour ce discours aigri que vous tenez. J’ai une liste à plusieurs noms de ces faux gentils.
  • m’a fait un cadeau empoisonné : ouais, on ne vous demande rien. C’est pas parce que tu paies un verre ou une rose, que t’as le droit à un retour sur investissement. On n’est pas des putes à l’oeil ou au rabais. La prostitution est un métier, qui doit être respecté. Alors pour obtenir une presta, gars… eh ben, paie ! Ou branle-toi…
  • m’a dit que j’étais pas sexy : ça m’est pas arrivé réellement. En revanche, les gars qui commentent que t’aurais pu mettre des talons ou des bas, alors qu’ils arrivent en pauvre jean débraillé et t-shirt Dec….. à un premier rencard…
  • ferme boutique après avoir éjaculé : « Ah, t’as encore envie ? Mais moi j’ai éjaculé, là, je peux plus rien pour toi… » Eduquons les hommes à l’utilisation de leurs mains et bouche… Et arrêtons de leur faire croire qu’on atteint l’orgasme en même temps qu’eux, et qu’on en a assez en même temps qu’eux.
  • qui trouve que le consentement n’est pas sexy : j’ai trop souvent lâché et accepté des trucs que je ne souhaitais pas. Parfois même après une salve de « non » auxquels on t’oppose la même salve « mais si, tu verras, tu vas aimer »… Je ne lâcherai plus.
  • qui m’a pénétrée en plein sommeil. Alors pourquoi pas si tu te révèles intéressée, mais bon nombre ont un gros problème avec le vrai consentement…
  • qui m’a sodomisée par surprise : Check… deux fois… connards…
  • qui regarde du porno : j’ai adoré cette lettre d’ailleurs, qui parle de manière intelligente du porno. Et de la manière d’en produire et consommer intelligemment. Regarder du porno oui, croire que ça représente la sexualité lambda et conditionne ce que la femme doit accepter, non… d’autant que le glissement vers la violence peut s’avérer dangereux.
  • tient à me faire le grand chelem : ouais, les gars comme ça… vous êtes fatigants et pas dans le bon sens du terme. Faire l’amour, c’est pas faire les J.O non plus quoi…
  • ne sait pas gérer le sexe sans lendemain : ouais, la conception est souvent binaire chez les gens. Soit on t’épouse, soit on te baise salement. Pas de juste milieu… c’est con et c’est moche.
  • m’a baisée sans capote : grand classique… et après, il a fallu se démerder… seule…
  • m’a laissé gérer le polichinelle : pas moi sur ce coup.

    En revanche, j’ai eu de très bons amants.

    Pas nombreux, mais ils existent. Non pas parce qu’ils étaient performants au sens strict du terme, mais parce qu’ils étaient humains, attentifs, dans l’échange. Parfois même drôles. Et ça, ça fait du bien ! Et n’oublions pas d’arrêter de leur foutre la pression sur l’érection. Il ne bande pas ? Sauf problème médical, on s’en fout. Ce sera pour la fois suivante, ou celle d’après. En attendant, on a plein de choses à découvrir dans le corps de l’autre. Le bon coup, c’est celui qui écoute et explore. Alors oui, on va pouvoir baiser après #metoo, mais juste mieux.

Ce mois-ci seule L’irrégulière joue avec moi et vous parle d’art d’aimer : CLIC

 

10 réflexions au sujet de “Baiser après #METOO – Lettres à nos amants foireux”

  1. « tient à me faire le grand chelem » : mais tellement ! Bon, celui-ci au moins est de bonne volonté.

    Je suis intéressée, mais plus parce que les types comme Enthoven ou Beigbeder me donnent des envies de meurtre quand je les entends se plaindre de ce que #Metoo voudrait retirer aux hommes. Je lis un essai littéraire de Mona Ozouf en ce moment, et ça me rend dingue que cette femme dont j’apprécie les analyses se range à côté des nostalgiques de la « galanterie à la française ». Je suis sortie courir il y a quelques jours, pour la première fois depuis deux ans (grossesse et bébé obligent) : sur mon kilomètre de sortie autorisé, alors que j’ai dû croiser quinze personnes, DEUX hommes m’ont fait des réflexions. Pas méchantes, certes, mais sur le même parcours un homme aurait eu une paix royale.

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    • Oui ce fameux droit d’importuner… les réflexions pas méchantes certes, mais on leur a rien demandé. Est-ce que nous, on se permet ça, non ? mais peut-être aimeraient-ils, va savoir, rires.
      Je ne suis pas nostalgique de la galanterie, pour moi ça supposerait qu’on a besoin d’être protégées, qu’on est fragiles… Je revendique en revanche un respect de l’autre, non pas en vertu d’une différence de sexe, mais en vertu du fait que je suis un être vivant 🙂

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      • Complètement d’accord. Je voulais dire que j’apprécie Ozouf en général, mais pas du tout quand elle défend la galanterie à la française qui rendrait le féminisme français distinct du féminisme américain.

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