Cela fait déjà plusieurs mois que j’ai envie de découvrir cet auteur dont bon nombre de personnes s’accordent à dire le plus grand bien. C’est donc par son tout dernier roman que j’ai entamé cette découverte. Entamé seulement car ce coup d’essai m’incite à vouloir lire Alabama Song dans un avenir très proche.
De quoi ça parle :
Ce roman est l’histoire d’une vie, une vie comme toutes les autres car à la fois banale et extraordinaire. Mais une vie singulière. Zola Jackson fait partie de ses femmes dont on dit qu’elle sont des forces de la nature. Ce genre de femmes que rien ne peut terrasser. Même pas un ouragan…
Dans ce roman, en effet, Zola va devoir, après que rien ne lui a été épargné (mort de son époux et de son fils, humiliations dans son travail), survivre au terrible ouragan qui a dévasté la Nouvelle-Orléans en avril 2005 : Katrina.
Ce confinement dans sa maison, puisque Zola refuse de partir et abandonner sa chienne, va être l’occasion de se remémorer les grands moments de sa vie mais également de les analyser, d’en faire un amère bilan.
Ce court roman nous projette au sein d’une catastrophe naturelle, une de celles qui conforte le peuple noir dans l’impression d’être les oubliés de la société américaine.
La plume de l’auteur mêle de manière harmonieuse ce que la nature humaine a de plus doux et et de plus ingrat à la fois. Il fait de son héroïne le symbole d’une Amérique noire qui bien que lettrée semble encore privée de ses lettres de noblesse. Il fait se heurter de plein fouet l’Amérique de la presse à sensation et la grande pudeur de Zola, digne jusqu’au bout.
Un roman où l’amour de son prochain est finalement la seule chose qui résiste à la tourmente. Mais un roman qui n’hésite pas à se faire le porte-voix des opprimés et des éternels oubliés.
Ce que j’en ai pensé :
J’ai tendance à aimer les livres épais, voire les sagas romanesques, qui me semblent plus adaptés pour faire entrer le lecteur dans une ambiance ainsi qu’à créer des caractères bien trempés. Gilles Leroy n’a eu besoin que de 140 pages pour écrire un de ces romans qu’on lit d’un souffle, auquel on ne cesse de penser et vers lequel on sait que, tôt ou tard, on reviendra.
Parce que Zola Jackson c’est l’amour sans limite d’une mère pour son enfant, avec tout ce que cela peut comporter d’erreurs mais aussi d’abnégation. Zola Jackson c’est la femme qui n’abandonne rien ni personne, même pas sa chienne pour sauver sa propre vie. Zola Jackson c’est aussi la femme noire qui a osé aimé un homme blanc et en porter l’enfant. Elle est la femme qui symbolise à elle seule le refus de céder aux préjugés, le refus de céder tout court.
Un roman dont la puissance est inversement proportionnel à sa taille.
Pour vous donner un avant-goût :
* » Et puis … quelle faveur, quel sursis demander au Ciel ? Le ciel, c’est juste ce qui nous tombe sur la gueule.
Dieu d’indifférence, où es-tu ? Te souviens-tu de tes enfants ? Te souviens-tu de les avoir livrés au monde ? Tu es celui qui abandonne, et l’abandon, on a assez de ça chez nous, sur notre pauvre terre, l’abandon on en aurait à revendre et c’est bien pourquoi je te renonce, je t’abolis et je te recrache, Seigneur mon maître et Dieu de merde. »
* » On ne change pas les rayures du zèbre. On peut dissimuler sa robe sous une couverture d’or, les rayures sont là, noir et blanc, elles demeurent blanc et noir. »
Ce roman a été lu dans le cadre des Chroniques de la rentrée littéraire et vous pouvez lire la fiche de l’auteur sur Ulike.
Vous pouvez également lire les billets d’Amanda, Fashion, Cathulu
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