22h36… Et cette femme est encore dans le métro. Harassée, épuisée par ces journées sans queue, ni tête. Abrutie, démunie face à ce pays qu’elle subit plus qu’elle ne le comprend vraiment. Elle aimerait leur dire à tous ceux qui lui suggèreraient de rentrer dans son pays, qu’elle n’a pas eu le choix et qu’au final elle ne sait même plus, si elle en a encore un, de pays.
Chaque jour, la même routine : se lever aux aurores pour aller nettoyer les bureaux souillés de ces gens qu’elle ne croise jamais, rentrer s’occuper de la maison désertée par les enfants partis pour l’école avant de retourner à la nuit tombée nettoyer d’autres locaux à l’autre bout de Paris. Espérer que les grands prendront soin des petits en son absence… car sans son revenu, aucun argent n’entre au foyer. Espérer ne pas croiser la police car elle n’a aucun papier à présenter.
Le simple spectacle de cette femme raconte à lui seul tout le paradoxe de son existence : un gilet acheté sur un marché aux puces de Clignancourt, supposé la protéger du froid et couvrir sa robe au tissu traditionnel et chatoyant. Un assemblage inélégant duquel se détache le noeud de son sac, tentative malhabile de coquetterie. Et ce visage qui porte à la fois dans sa chair le symbole d’un ailleurs mais également dans ses traits toute la fatigue du monde. Une femme sans âge… et pourtant pas si vieille.
Demain matin, elle n’ira pas travailler. Hamidou, son aîné, passe en conseil de discipline. Elle sait ce que ces gens pensent : un enfant livré à lui-même, qui erre dans la cité le soir. Une mère peu présente… coupable forcément. Une famille qui ne saurait pas s’intégrer et vivrait sur le dos de la société… Oh non, pas sur son dos… mais à sa marge, cruellement. Peu importe les efforts, peu importe la volonté de faire au mieux et de se débrouiller. Le jugement impitoyable mais pas de main tendue.
Alors profiter des quelques stations qui lui restent encore pour souffler un peu et oublier un instant…
Merci pour ces quelques mots.
Merci pour les tiens aussi 😉
C’est si vrai ! Superbe texte.
J’aime cette image d’un vieux gilet qui recouvre les chatoiements d’un tissu traditionnel.
Cela ternit ces femmes qu’on aimerait si lumineuses 😉
Je savais que tu serais à la hauteur de cette belle image. Très joli texte. Bravo ma Stephie. Bisous
Merci de ton gentil commentaire. Bisous
Très beau texte vraiment, j’aime la description des détails, celui de son gilet, du noeud de son sac…
Un texte bien trop vrai, malheureusement.
Malheureusement, en effet. Et je me suis retenue de parler de la condition de la femme, trop polémique sur un texte si court
Superbe … je reste sans voix face à une telle lucidité
Sans doute car elle aurait pu être la mère d’un de mes élèves.
Elle existe vraiment cette femme. Merci d’en avoir parlé.
Oui, il en existe même plusieurs 😉
Un texte magnifique.
Merci ma belle
Une quotidien difficile qui colle à la réalité.
Tout à fait 😉
Ce texte sonne malheureusement très juste…
Malheureusement, en effet 😉
Superbe. Merci ma Stephie pour ces mots.
Merci à toi d’être passée me lire 😉
J’ai adoré. Tu sais quoi, creuse ce registre.
Il y a deux romans que je rêve d’écrire autour de ce sujet.
Tu le tiens, ton sujet, alors.
Fonce.
Il me faut du temps, de la documentation, etc. Oui, oui, je sais, des excuses…
Oui, des excuses, exactement ça.
En lisant ton texte, je me suis dit que c’était ça ton style. C’est toi, et c’est beau.
Merci 😉
Quel beau texte et tellement vrai, tu arrives à mettre des mots sur des sentiments ou pensées que je ressens sans pouvoir aussi bien l’exprimer, merci
Merci beaucoup pour ton compliment <3
C’est très réaliste: bravo.
Merci ma belle